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Madagascar: l"affaire Daewoo" alimente la colère contre le gouvernement
AFP 11.02.09 | 06h50
La colère suscitée à Madagascar par un vaste projet agricole, conclu entre le gouvernement et la société sud-coréenne Daewoo Logistics, alimente la crise actuelle dans la Grande Ile, où la cession de terres à des étrangers est communément perçue comme une trahison. En novembre, la population malgache apprenait via la presse étrangère l'existence d'un protocole d'accord quelques semaines auparavant qui accorderait à Daewoo Logistics 1,3 million d'hectares de terres non cultivées pour produire de l'huile de palme et du maïs, soit la moitié de la superficie de la Belgique. La société sud-coréenne, dont l'investissement se monterait à six milliards de dollars sur 20 ans, s'engagerait en contre-partie à construire des infrastructures et créer quelque 70.000 emplois. "L'affaire Daewoo a vraiment entraîné une levée de boucliers parce que la terre, c'est une donnée sacrée à Madagascar et donner une superficie de cette ampleur, ça a été considéré comme une sorte de trahison nationale", explique Jean-Eric Rakotoharisoa, constitutionnaliste. "La terre est sacrée car elle appartient aux ancêtres. C'est là où on habite, où on plante, là où se trouve le tombeau des ancêtres. La terre est un objet de vive émotion ici", confirme l'anthropologue malgache Pierre André. Pourtant, une loi votée fin 2007 a assoupli les conditions d'investissements étrangers sur l'Ile, notamment pour des projets agricoles. Le maire destitué de la capitale malgache, Andry Rajoelina, en guerre ouverte avec le président Marc Ravalomanana dont il est devenu le principal opposant, en a fait l'un de ses chevaux de bataille. "Daewoo, ça fait partie de la colère (de la population). Je condamne les signataires, le gouvernement et le président notamment. Dans notre coutume, c'est interdit de vendre ou louer des terrains à des étrangers", déclarait récemment M. Rajoelina à la presse. Côté gouvernement, après avoir avoir fait preuve d'une discrétion sans borne sur le projet, on s'escrime à présent à en minimiser l'avancement et surtout à en préciser les termes. "Daewoo a fait une prospection pour 1,3 millions d'hectares", confirme Justin Mosa, le secrétaire général du ministère de la Réforme foncière, des domaines et de l'aménagement du territoire. "Nous estimons à 35 millions d'hectares les terres arables du pays. Actuellement, les terres cultivées représentent à peu près 3 millions d'hectares dont 1,3 pour le riz", précise-t-il. "Nous avons prévu des terrains qui, par le biais de baux emphytéotiques (18 à 99 ans), peuvent être cédés à un investisseur moyennant contre-partie. La demande est libre mais nous, nous regardons en fonction de l'aménagement du territoire et du développement rural", explique-t-il. "Pour le moment, nous n'en sommes qu'au stade de l'instruction des demandes", processus très lent impliquant plusieurs ministères, souligne-t-il. L'affaire Daewoo a eu d'autant plus de résonance dans un pays où 70% de la population est rurale qu'elle met en lumière une contradiction entre la redistribution des terres aux paysans prévue par une réforme majeure entamée en 2005 et l'ouverture de ce marché aux sociétés étrangères. La réforme foncière de 2005, l'une des plus symboliques et des plus ambitieuses menée par l'administration Ravalomanana, a cassé le principe de "domanialité" en vigueur depuis le début de la colonisation en 1896. Les paysans qui exploitaient depuis plusieurs années, voire plusieurs générations, une terre sur laquelle ils n'avaient aucun droit légal ont désormais la possibilité de la faire "certifier" grâce à une procédure simplifiée
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