Manifestation
Bain de sang à Ambohitsorohitra
Samedi à Ambohitsorohitra, les éléments armés chargés de la garde palais d’état ont tiré sur les manifestants. Le bilan est très lourd.
Quatre, cinq, six personnes, à première vue, gisent à 60 mètres du portail du palais d'état d'Ambohitsorohitra après deux rafales successives de tireurs qui se cachent derrière le mur d’enceinte du bâtiment présidentiel. Au milieu d'elles, un homme d’une cinquantaine d’années touché au ventre lève sa main droite pour demander du secours. Sa chemise s’imprègne de son sang qui continue de couler. Ce n'est que quelques minutes plus tard qu'une dizaine de jeunes manifestants osent s’aventurer de son côté pour ramasser les corps et aider les blessés à s'éloigner. Des journalistes qui se camouflent dans un hôtel près du palais d'état, ont un sursaut de surprise en voyant à travers la vitre le corps de leur jeune confrère cameraman de la télévision RTA transporté par trois jeunes gens. Ces derniers l'amènent vers la foule devant le siège de la banque BMOI à Antaninarenina. Par la suite, des fusillades s’entendent toutes les demi-heures. Il est environ 17 h 30 au moment où des tireurs sortent du palais pour chasser des manifestants en colère qui, campés dans le jardin séparant l'hôtel du Louvre et le bâtiment de l'Office national de l'environnement, les provoquent.Tout a commencé ou plutôt les tirs ont débuté en ce samedi après-midi après l’échec de la négociation entre une délégation de six parlementaires conduite par le général Dolin Rasolosoa, directeur de cabinet d'Andry Rajoelina à la mairie de Tana, d’une part, et de trois hommes en tenue militaire qui n'arboraient pas leur grade, de l’autre. « Nous sommes tout simplement chargés de la garde du palais. Nous ne sommes pas habilités à négocier. Adressez-vous aux responsables si voulez négocier », expliquent-ils. Le général Dolin Rasolosoa n'a pas eu le temps de rapporter le résultat de la négociation. Les manifestants ont réussi à franchir le barrage formé pas une soixantaine d’éléments des forces de l'ordre de l'état-major mixte opérationnel au niveau national. Mais ils n'iront pas loin.« Démocratie directe »Par leur initiative, ils comptaient disposer du palais d'Ambohitsorohitra qui servira de bureau à Monja Roindefo, le Premier ministre proclamé par le dirigeant du mouvement Andry Rajoelina le matin même sur la Place du 13 Mai. « J'ai une question à vous poser. Nous allons conquérir le palais maintenant ou non ? », a demandé Monja Roindefo à la foule à l’issue de son discours à Analakely, dans lequel il a parlé de démocratie directe. Comme une seule personne, les manifestants n'ont pas hésité à lui répondre par l'affirmative.Concernant les tireurs, Patrick Monibou, dirigeant du mouvement pro-Andry Rajoelina dans le Nord de l'île, a soutenu hier qu'aucun élément du 2e RFI n'a quitté Antsiranana pour rejoindre la capitale. « Des éléments de ce régiment ont été aperçus vendredi se dirigeant vers l'aéroport. Ils auraient dû être envoyés à Tana. Mais à la suite d’un contre-ordre, ils ont regagné leur camp. », dit-il.
Fano RakotondrazakaDate : 09-02-2009
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Chaque camp blâme l’autre
Malgré les morts et les blessés, les discours des deux camps sont loin de prôner l’apaisement. Ils se rejettent la responsabilité.
La tension ne semble pas près de s’apaiser. Alors que le bilan de la crise politique de 2009 vient de s’alourdir d’au moins 28 autres morts et de plus de 200 blessés, les deux camps ne donnent aucun signe de fléchissement. Dans leurs interventions radiodiffusées, les deux principaux protagonistes, le président Ravalomanana et Andry Rajoelina, se sont mutuellement rejeté la responsabilité du massacre de samedi dernier devant le palais d’État d’Ambohitsorohitra, à Antananarivo. Le chef de l’État a reproché au fondateur du Tanora malagasy vonona (TGV) d’avoir conduit ses partisans à la potence, tandis que l’ancien maire d’ Antananarivo a accusé le président de la République d’avoir fait tirer sur la foule par des tireurs d’élites et des commandos. « Il (Andry Rajoelina) a amené les gens à venir prendre le palais présidentiel, ce qui est une chose inadmissible, alors qu’il ne les maîtrise pas », a déclaré le chef de l’État dans un communiqué radiodiffusé et télévisé diffusé en boucle sur les chaînes nationales et sur les ondes de ses radios. Mais «vous avez les mains tâchées du sang de vos compatriotes », a, de son côté, clamé Andry Rajoelina, d’une voix enrouée, sur la télévision Viva. « Il n’y avait personne à protéger dans le Palais, et la défense des bureaux qui s’y trouvent ne nécessitait pas autant de sang versé », a-t-il ajouté. Deuil nationalHier, dans la cour de l’hôpital Ravoahangy Andrianavalona, où il a rendu visite aux blessés, l’ancien maire a encore laissé libre cours à sa colère. « Partout dans le monde, les forces de l’ordre lancent d’abord une sommation avec l’aide d’un matériel de sonorisation puis dispersent la foule avec des grenades. Or, samedi, ils ont immédiatement procédé à des tirs en rafales », a-t-il dénoncé. Très remonté contre le chef de l’État, le fondateur du TGV annonce la poursuite de la lutte « jusqu’à la victoire finale ». Le gouvernement, de son côté, tente, tant bien que mal de rassurer l’opinion. « Des mandats d’arrêt ont déjà été émis par la Justice contre les responsables des troubles et des saccages», a déclaré le ministre de la Sécurité intérieure, Désiré Rasolofomanana. Ce dernier a par ailleurs appelé la population à « prêter main forte aux forces de l’ordre en donnant toutes informations utiles aux enquêtes ». « Les Malgaches doivent plus que jamais s’écouter», a prêché le Premier ministre, Charles Rabemananjara, quelques heures après la fusillade. Mais en attendant que les deux parties trouvent un terrain d’entente, le bras de fer se poursuit. Andry Rajoelina annonce une journée de deuil national, tandis que le pouvoir central, par le biais du préfet de police de la ville d’Antananarivo, Edmond Rakotomavo, prône un rapide retour à la normale. « Les fonctionnaires sont invités à poursuivre leur travail quotidien afin de satisfaire les besoins de la population», a-t-il enjoint.
Lova Rabary-RakotondravonyDate : 09-02-2009
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Banque de sang
Affluence de donneurs
Une réponse patriotique. Des donneurs bénévoles issus de différentes couches sociales, communautés et associations ont apporté leur soutien aux blessés de l’attaque d’Ambohitsirohitra de samedi. Cette affluence fait suite à un appel diffusé sur des stations télévisées de la capitale quelques heures après la fusillade.Une longue queue s’est formée dans l’enceinte du Centre national de transfusion sanguine (CNTS) de l’hôpital Joseph Ravoahangy Andrianavalona (HJRA), très tôt dans la matinée. « Je n'ai ni parent ni proche victime de l'agression. Je viens ici par amour pour mes compatriotes », a déclaré un père de famille issu d'une association humanitaire.La même motivation animait la majorité des donneurs venus au HJRA. « J'agis au nom de l'humanité. Je considère les Malgaches comme mes frères et mes soeurs même si nous ne sommes pas de la même race », avoue une femme membre de la communauté musulmane.Des personnalités politiques se sont également rendues en tant que citoyens à cette donation de sang, à l'instar du président de l'Assemblée nationale, Jacques Sylla et l'ancien maire de Toamasina Roland Ratsiraka. « Je suis venu ici non pas en tant que membre du Lions’club ni au nom du gouvernement, mais par solidarité envers mes compatriotes », a souligné Jacques Sylla. Une organisation spéciale vient d'être mise en place pour gérer la prise de sang dans la mesure où ce service n'a pas connu autant d'affluence depuis 1es évènements de 1991. Une voiture mobile s'ajoute aux autres pièces aménagées pour accueillir les bénévoles. Une vingtaine de membres du Lions club Analamanga épaulent ceux du CNTS. Mille personnesUn millier de poches de sang ont pu être récoltées pendant la matinée d’hier. « D’ici midi, le cap des mille personnes sera atteint d’après le nombre de tickets distribués», déclare Vinay Ramjee, Past président du Lions club Analamanga. Cette association s'est également chargée de la collation, composée de jus de fruits, d'eau minérale et de beignets, offerte aux donneurs après la prise de sang.Jusqu'ici, une centaine de blessés sont encore hospitalisés à la HJRA. La majorité d’entre eux nécessitent une transfusion sanguine. « Une cinquantaine de poches de sang issues de notre stock viennent d’être utilisées depuis samedi jusqu'à dix heures ce matin pour faire face aux urgences. Les prélèvements d’aujourd’hui (dimanche) sont nécessaires pour les prochains jours et pour renforcer le stock de la banque de sang », indique le docteur Natolotra Andrianavalona, directeur du CNTS. Un malade nécessite une, deux ou trois poches de sang par jour selon la gravité de ses blessures. Environ cinq cents personnes se sont bousculées au service de transfusion sanguine dans l'après-midi de samedi, mais plusieurs d'entre eux n’ont pu être reçus à cause du couvre-feu.
Noro Haingo RakotosehenoDate : 09-02-2009
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bohitsorohitra
Ando de la RTA, tué caméra en main
Le jeune journaliste de Radio télévision Analamanga (RTA), Ando Ratovonirina a perdu la vie pendant la fusillade qui s'est produite à Ambohitsorohitra, samedi après-midi. Une balle meurtrière l'a atteint pendant qu'il était en fonction, caméra en main. L'image de choc de la meute de manifestants qui fonçait en direction du palais d'Ambohitsorohitra est l'une des dernières scènes qu'il a capturées.Il a également pu filmer les négociations que les meneurs de manifestations, dont le général Dolin Rasolosoa et quelques parlementaires, ont entamées avec les forces qui protégeaient le palais présidentiel. Des militaires ont ouvert le feu sur lui et les manifestants qui étaient en première ligne, dès que les soldats postés quelques dizaines de mètres plus loin ont reflué devant la foule qui les bousculait. Ando Ratovonirina est né le 25 mai 1983 . Il avait un frère jumeau. Il avait à peine 26 ans lorsque la mort l'a happé. Diplômé en communication médiatique de l'Université d'Antananarivo, il assurait la rubrique culturelle du quotidien La Gazette de la Grande île avant d'intégrer l'équipe de la RTA.PacifisteIl était connu comme un pacifiste «Pendant les quatre merveilleuses années qu'on a vécues avec lui à l'université, pas une seule fois, on a vu Ando se disputer avec quelqu'un» confie un de ses camarades de classe. « Même dans les situations d'effervescence, il n’élevait jamais la voix. Il se contentait d’allumer une cigarette et de réfléchir à la solution », enchaîne son ami Rado Andrianaivomanana.La musique était l'un de ses passe-temps. Il était membre de la chorale « Ny Feo mamantonalina». En outre, le son et l'image le passionnaient. Doué en la matière, il en a fait son métier. Son titre était journaliste reporter d'image. Ses funérailles auront lieu à Mahitsy, le mercredi 11 février .
Seth AndriamarohasinaDate : 09-02-2009
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HOPITAL RAVOAHANGY ANDRIANAVALONA
Les urgences prises d'assaut
Après-midi mouvementé, samedi, au service des urgences l'Hôpital Joseph Ravoahangy Andrianavalona (HJRA). L'affluence exceptionnelle de blessés, victimes des tirs des forces de l'ordre à Ambohitsorohitra, a submergé le service. Vers 18 heures, le registre d'entrée a recensé près de 180 blessés. 108 ont été hospitalisés, le reste a pu rentrer après les premiers soins.L'odeur du sang a envahi les narines dès la salle d'accueil. Le carrelage est ensanglanté. Faute de place, les blessés sont soignés à même le sol. Entre-temps, les ambulances ne cessent de faire le va-et-vient entre la ville et l'Hôpital. Même les voitures particulières ont été « réquisitionnées » pour transporter les victimes. Services débordésDès l'arrivée d'un véhicule, quatre ou cinq individus se placent devant pour se frayer un chemin au milieu des gens choqués. Les sifflets de mobilisation sur la Place du 13 Mai reprennent. Mais c'est surtout pour signaler l'arrivée d'un nouveau blessé. La foule, agglutinée devant la porte et dans la cour de l'hôpital, cède alors le passage.Habitués à la cohue, les urgentistes avancent sans s'affoler, continuant leur travail. Les médecins et les paramédicaux assurant la permanence du week-end sont débordés, mais leurs collègues qui, en principe, étaient au repos, sont venus leur prêter main forte. Les stagiaires sont aussi venus aider au service, cet après-midi.La déclaration d'un des responsables du service montre quand même l'étendue de la charge de travail des médecins. « Je ne sais pas à quelle heure on a commencé à recevoir les blessés. C'est un détail auquel je n'ai pas prêté attention », a-t-il confié. Dans la cour, la foule se masse devant les portes, les uns par curiosité, les autres pour avoir des nouvelles d'un proche, certains pour rendre service au cas où. « Quatre hommes pour transporter un malade », annonce un médecin. Et quatre individus s'avancent pour s'exécuter. « Du sang », et voilà des femmes qui se détachent de la foule pour se rendre vers le bâtiment où le don doit s'effectuer.Devant toute cette cohue, Jocelyn Ratolojanahary, l'un des blessés, grimace. « J'ai encore mal », se plaint-il. Assis sur le banc devant la porte principale du bâtiment, la main gauche tenant fermement le bras droit muni d'un bandage, il raconte sa mésaventure. « J'étais en première ligne parmi les manifestants. La foule a marché pacifiquement quand tout d'un coup, les militaires ont ouvert le feu. Une balle a traversé la paume de ma main. Tout cela est injuste », a-t-il raconté.Mais le malheur de Jocelyn Ratolojanahary ne se limite pas à sa blessure. « Je n'ai pas retrouvé ma soeur, infirme, qui était avec moi à Antaninarenina. Je ne sais pas ce qui lui est arrivé », conclut-il, l'air inquiet.
Iloniaina AlainDate : 09-02-2009
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PLACE DU 13 MAI
Rajoelina nomme Monja Roindefo « PM »
Pour montrer l'équilibre régional au sein de son équipe, Andry Rajoelina a nommé Monja Roindefo, un côtier de la région sud de Madagascar, comme Premier ministre de son « gouvernement ».
Andry Rajoelina, principal opposant de Marc Ravalomanana, a franchi un nouveau palier samedi à la place du 13 mai à Analakely. Pour répondre à l'aspiration de ses partisans, le maire d'Antananarivo Renivohitra a dévoilé l'esquisse de sa stratégie en nommant le premier ministre de son contre-gouvernement. Perle Rasoloarijao, adjoint au maire de la CUA, lors de son intervention devant une marée humaine à Analakely, a ensuite procédé à la présentation de Monja Roindefo Zafitsimivalo, désormais numéro un de son gouvernement.Diplomé des états-Unis, Monja Roindefo est le fils de feu Monja Jaona, bouillant politicien nationaliste des années 70 et 80. La nomination de ce jeune premier ministre originaire d'Antanimora Ambovombe reflète la pensée d' Andry Rajoelina, qui veut instaurer une politique d'unité nationale.« La nomination de Monja Roindefo montre notre politique d'équilibre régional. Un jeune technicien et prêt à travailler pour la prosperité de son pays », déclare Andry Rajoelina, lors de sa présentation. Le premier ministre a, pour sa part, annoncé que le pouvoir appartient au peuple et il lui appartient de décider en qui il veut faire confiance pour diriger le pays. « Madagascar mérite mieux que la faim et la pauvreté »,a-t-il assené. Après son discours en trois langues (malgache, français et anglais), Monja Roindefo a rassuré l'assistance en faisant répéter à la foule le « yes we can » de Barack Hussein Obama, président des états-Unis lors de son élection.La journée du samedi à la place du 13 mai a été riche en surprise. Perle Rasoloarijao, avant de présenter le nouveau premier ministre, n'a pas non plus manqué d' annoncer la responsabilité d'Andry Rajoelina. Il a été proclamé président de la haute autorité de transition à Analakely. Le programme de cet ancien maire d'Antananarivo se dessine petit à petit. La vision d'Andry Rajoelina sur le devenir des deux chambres parlementaires reste cependant à connaître, tout comme le statut du chef de l'état.
Andry RatovoDate : 09-02-2009
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Hôpitaux
31 victimes à la morgue
Les employés de la morgue de l'hôpital Joseph Ravoahangy Andrianavalona (HJRA) ont été complètement débordés, depuis samedi jusqu'à hier. Les deux garçons chargés du fonctionnement de ce service ont travaillé sans répit pour s'occuper de l'accueil et du traitement des cadavres des victimes de la fusillade d'Ambohitsorohitra. Les informations recueillies auprès de ce service font état de 28 morts, dont cinq non identifiés. L'ambiance y était invivable. Des corps inanimés, la plupart criblés de balles, gisant à même le sol, faute d'infrastructures adéquates pour les recevoir. A l'extérieur, une foule faisait la queue pour entrer dans les deux pièces où se trouvaient les dépouilles. Beaucoup d'entre eux sont venus pour récupérer le corps d'un proche. D'autres étaient là pour tenter de retrouver des membres de leur famille qui ne sont pas rentrés depuis samedi. Malheureusement, certains sont rentrés bredouilles. Tel était le cas d'une jeune fille qui était à la recherche de ses deux frères, hier. Elle a affirmé avoir fait le tour des hôpitaux de la ville, dont celui de Befelatanàna mais en vain.
Teholy MartinDate : 09-02-2009
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