lundi 28 octobre 2013

carbone à tout faire : graphéne

carbone à tout faire

( Graphene tracker  Mada:

http://www.graphenetracker.com/companies/335/energizer-resources-inc/ )




 

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | • Mis à jour le |
Cette molécule vaut de l'or. Moins par son prix actuel, de quelques centaines d'euros le kilogramme, que par les promesses qu'elle renferme. L'Union européenne est prête à lui consacrer un milliard d'euros, entre 2013 et 2023, pour démontrer qu'elle peut effectivement bouleverser des domaines aussi variés que l'électronique, l'énergie, la santé ou la construction. Le nombre d'articles consacrés à cette molécule a été multiplié par 40 entre 2005 et 2012, pour atteindre plus de 8 000, selon la base de données bibliographiques Scopus.
Une mine de crayon, du graphite et du graphène collé sur du Scotch.
Cette molécule si précieuse, c'est le graphène. Comme son nom l'indique, elle est apparentée au graphite, du grec « écrire », matériau dont sont faites les mines de crayon. Comme lui, elle est entièrement composée d'atomes de carbone mais, dans un millimètre de graphite, il y a quelque trois millions de feuillets de graphène empilés. Car, là où le graphite est un arrangement cristallin à trois dimensions, le graphène est, lui, un cristal bidimensionnel, aussi fin qu'un atome. Ces carbones se répartissent parfaitement sur un plan, aux sommets d'hexagones collés les uns aux autres. A notre échelle, la structure évoque le grillage d'un poulailler ou celui de nids d'abeille. L'épaisseur n'est que de 0,3 nanomètre (un nanomètre vaut un millionième de millimètre) et 0,1 nanomètre seulement sépare deux atomes voisins.
Cette pureté à 100 % carbone et cette simplicité confèrent à l'ensemble des propriétés inégalées. Elles sont même très proches de celles calculées en théorie, comme le font remarquer les auteurs d'une feuille de route pour le graphène parue dans Nature le 11 octobre 2012.
 200 FOIS PLUS SOLIDE QUE L'ACIER
Cette molécule conduit bien mieux le courant électrique que le cuivre. Elle est 200 fois plus solide que l'acier (et six fois plus légère). Elle est quasi parfaitement transparente, n'absorbant que 2 % de la lumière. Elle forme une barrière imperméable à des gaz aussi légers que l'hydrogène ou l'hélium. Comme si cela ne suffisait pas, il est possible d'ajouter en surface des composés chimiques pour en modifier les propriétés.
« Le graphène est une plate-forme, comme un jeu d'échecs sur lequel on peut déposer les pièces que l'on veut. Toute la subtilité est de trouver les bons positionnements. Il y a une beauté dans sa simplicité », détaille Vincent Bouchiat, de l'Institut Néel, à Grenoble (CNRS). « C'est l'avenir dans une mine de crayon », lance, en guise de slogan, Annick Loiseau, de l'Office national d'études et de recherches aérospatiales (Onera), représentante de la France dans le bureau exécutif du consortium sur le graphène que l'Union européenne soutient pour dix ans.

Ce projet a été lancé officiellement le 11 octobre. « Nous avons déjà compris beaucoup de choses mais, dans certaines situations, de nouveaux effets pourraient apparaître. On ne sait pas encore lesquels ! », s'enthousiasme Mark Goerbig, chercheur CNRS au laboratoire de physique du solide de l'université d'Orsay.
Le matériau miracle revient de loin. Une telle structure bidimensionnelle était réputée, en théorie, instable. Elle préfère s'enrouler en un tube par exemple, comme cela a été observé, dans les années 1990, dans les nanotubes de carbone.
PRIX NOBEL DE PHYSIQUE 2010
A partir de 2004, le Néerlandais d'origine russe Andre Geim avec le Russo-Britannique Konstantin Novoselov et d'autres chercheurs publiaient les premières mesures électroniques prouvant qu'ils avaient bien isolé du graphène. Pour l'anecdote, ils avaient arraché des plans de carbone à du graphite à l'aide d'un simple morceau de Scotch. Ce qui leur vaudra le prix Nobel de physique en 2010.
« La théorie n'était strictement valable qu'en deux dimensions. En réalité, le cristal pousse dans un espace à trois dimensions et de petites fluctuations en surface, comme des vagues, stabilisent le cristal », explique Mark Goerbig. Très vite les expériences confirment les comportements merveilleux du nouvel objet. Cela s'explique par l'existence d'une sorte de mer d'électrons en surface, que rien n'arrête et qui n'interagissent pas entre eux. Tout se passe comme si les électrons n'avaient pas de masse et filaient à des vitesses trois cents fois plus faibles que celle de la lumière. L'équation mathématique qui les décrit est alors plus proche de celles décrivant les particules de hautes énergies que celle propre aux matériaux solides. D'où ces performances exceptionnelles qui font rêver.
Transparent et conducteur, il pourrait remplacer les électrodes en indium qui équipent aujourd'hui les écrans tactiles. Léger et conducteur, il pourrait s'intégrer dans des matériaux composites afin d'évacuer les impacts de foudre sur la carlingue d'un avion. Imperméable, il ferait d'excellents réservoirs à hydrogène.
EXFOLIATION « CHIMIQUE »
Mais, petit détail, comme rien n'arrête ses électrons, il est a priori un mauvais candidat pour fabriquer des transistors, qui sont les composants rois de l'électronique actuelle et qui, justement, servent à contrôler le passage des électrons. Qu'à cela ne tienne, si de fins rubans sont découpés dans le plan de graphène, cette nouvelle géométrie permet de réaliser les fameux transistors.
Le consortium européen a donc en ligne de mire plusieurs applications. « Notre mission est de soutenir l'innovation en Europe mais aussi de devenir un réseau de spécialistes au contact des entreprises pour de la recherche et développement [R & D] à long terme », expose Stephan Roche, responsable d'un des chapitres du projet européen et chercheur à l'Institut catalan en nanoscience et nanotechnologie (Barcelone).
Les grandes manoeuvres ont déjà commencé. Plusieurs start-up fabriquent du graphène, pour l'instant à destination des laboratoires, selon différentes méthodes. La technique « historique », par arrachage de matière à l'aide d'un morceau de Scotch, a été remplacée par une exfoliation « chimique ». D'autres utilisent un substrat à base de carbone et de silicium, qu'ils chauffent pour faire partir les atomes de silicium et laisser en surface une couche de graphène. D'autres encore apportent du carbone sur des surfaces de cuivre qui, après chauffage, catalysent la réaction de formation du graphène. Une équipe de l'université Rice, aux Etats-Unis, a même utilisé comme source de carbone des pattes d'insectes grillées...
DES GÉANTS SUR LES RANGS
En Europe, le Royaume-Uni, avec Applied Graphene Material, et l'Espagne, avec Avanzare ou Graphenea, sont en pointe. « Si l'on veut que le graphène devienne comme le silicium aujourd'hui en microélectronique, la maîtrise du matériau et de sa qualité est indispensable », prévient Etienne Quesnel, du CEA, responsable de la thématique énergie au sein du projet européen, dans lequel des spécialistes de la fabrication sont impliqués.
Des géants sont aussi sur les rangs. IBM a réalisé plusieurs prototypes de composants électroniques. Samsung a présenté un écran plat de plus de 70 cm de diagonale avec des électrodes en graphène. Le fabricant de raquettes Head a eu recours aux vedettes du tennis Novak Djokovic et Maria Sharapova pour assurer la promotion de sa raquette incorporant du graphène. BASF, avec Daimler-Benz, imagine un concept-car, Forvision, bien fourni en matériaux à base de graphène. En 2012, dans un rapport consacré à l'avenir du graphène, cette entreprise prévoit un marché de 1,5 milliard de dollars en 2015 et 7,5 milliards en 2025.
Comme il se doit, la Chine est aussi dans la course, avec presque autant d'articles publiés que l'Europe, plus de 2 600. Mais, avec plus de 2 200 brevets, elle dépasse l'Europe et les Etats-Unis. Une start-up chinoise, Bluestone, a même annoncé, cet été, un partenariat avec un fabricant de mobiles pour de premiers écrans à base de graphène dans les prochains mois sur le marché chinois. Il y a cependant loin de la coupe aux lèvres.
TOUTE L'ATTENTION... ET LES CRÉDITS
« On vous vend du graphène, qui n'est que du graphite, mais plus cher ! », s'est exclamé Marc Monthioux, du Centre d'élaboration des matériaux et d'études structurales à Toulouse, lors d'une conférence, le 16 avril à Paris, autour des matériaux composites à base de graphène. Stricto sensu, le graphène est monocouche, mais les procédés de fabrication peuvent créer des empilements de plusieurs feuillets. Au-delà de dix couches, les propriétés changent beaucoup et ressemblent plus à celles du graphite qu'à celles du graphène...
« La supériorité du graphène sur les nanotubes de carbone n'est pas absolue », a également précisé Marc Monthioux. « Dans les composites, pour avoir de la conductivité il faut que les molécules de carbone, graphène ou nanotube, se «touchent». Avec les nanotubes allongés, c'est plus facile que pour le graphène en forme de flocons. Ce qui explique des différences », explique Annick Loiseau. Elle rappelle aussi que développer un matériau composite est long et que les nanotubes bénéficient d'une maturité plus grande que le nouveau venu. La communauté des nanotubes a d'ailleurs mal vécu l'arrivée du graphène, qui attire désormais toute l'attention... et les crédits.
Toute l'expérience accumulée sur les nanotubes sert tout de même pour accélérer les travaux sur le graphène. « Il a fallu six à sept ans avec les nanotubes pour faire de premiers transistors. Avec le graphène, en un an, on avait de premières mesures électriques », rappelle Annick Loiseau.
L'IMPACT SUR LA SANTÉ ET L'ENVIRONNEMENT
Sur le plan des effets sur la santé de ce nouveau matériau, les connaissances acquises sur l'un vont aussi servir à l'autre. L'un des volets du projet européen est même consacré à cette question cruciale pour la protection des travailleurs et utilisateurs, tout comme pour le développement d'applications médicales. « Aujourd'hui, on trouve des études ne montrant aucun effet et d'autres indiquant un risque potentiel », constate Alberto Bianco, directeur de recherche CNRS à l'Institut de biologie moléculaire et cellulaire de Strasbourg et coresponsable du volet consacré à l'impact du graphène sur la santé et l'environnement dans le projet européen.
En fait, comme pour les nanotubes de carbone, il faut tenir compte de la grande diversité de formes du graphène. Certes la taille compte, mais aussi l'état chimique. La molécule peut être plus ou moins oxydée, ou contenir plus ou moins d'impuretés résiduelles liées aux modes de synthèse, ou encore être constituée de plusieurs feuillets... Dans un article paru en avril dans Angewandte Chemie, Alberto Bianco conclut que la situation n'est pas encore claire. Il cite par exemple certaines études contradictoires, les unes trouvant des effets toxiques sur les micro-organismes quand d'autres n'en trouvent pas. Les manières dont le graphène pourrait endommager les cellules ne sont pas élucidées non plus : le plan de graphène fend-il la paroi perpendiculairement ou bien enrobe-t-il la cellule ?
NOUVELLES VOIES VERS D'AUTRES MATÉRIAUX À DEUX DIMENSIONS
« Ce qui rend optimiste, c'est que la chimie peut permettre de moduler l'activité biologique de ce nanomatériau », explique Alberto Bianco. En liant différents groupements chimiques, on peut rendre, par exemple, le graphène plus ou moins soluble. Ou le guider vers telle ou telle cible d'intérêt thérapeutique. Des travaux supplémentaires sont donc nécessaires. Le consortium étudiera ainsi les effets sur différentes lignées cellulaires (cancéreuses, neuronales, liées au système immunitaire...) ainsi que sur des amphibiens.
Un autre avantage du graphène est qu'il ouvre de nouvelles voies vers d'autres matériaux à deux dimensions aussi fins qu'un atome. Le nitrure de bore, le sulfure de molybdène ou de tungstène, voire du silicène à 100 % en silicium (mais pas encore observé) sont autant de noms un peu barbares qui attendent leur heure. Certains sont isolants, d'autres conducteurs. Empiler ces molécules plan par plan créerait de nouveaux matériaux aux propriétés inédites. Le terrain de jeu va prendre de la hauteur.

Applications Ecrans L'indium actuellement utilisé dans les écrans plats et tactiles est rare et cher. Des plans de graphène, transparents et conducteurs, seraient d'excellents remplaçants. Les propriétés mécaniques sont également compatibles avec les futurs écrans flexibles.
Batteries En tant qu'électrode, il pourrait améliorer le nombre de cycles de charge et décharge, et donc la durée de vie.
Solaire Absorbant très peu la lumière, il rendrait plus efficaces les cellules solaires actuelles.
Matériaux Intégré à des polymères, le graphène les rendrait conducteurs, ce qui est utile pour des encres ou peintures électroniques, des matériaux évacuant les charges électriques (comme lors d'un coup de foudre), des tissus chauffants ou électroniques...
Electronique Le comportement des électrons dans le graphène fait de lui un candidat pour des composants ultrarapides à plusieurs centaines de gigahertz de fréquence.
Santé La structure biocompatible du graphène peut servir de squelette à la croissance de tissus organiques en médecine régénérative. Certains envisagent aussi des rétines artificielles. Pénétrant au coeur des cellules, il pourrait aussi servir de vecteur pour des médicaments.
Spintronique L'avenir des mémoires et des composants électroniques passe par l'utilisation du « magnétisme » des électrons, le spin. Le graphène aurait les propriétés ad hoc pour faciliter le développement de tels composants.
Capteurs Sa pureté d'origine le rend très sensible aux moindres perturbations, ce qui en fait un bon capteur pour

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