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mardi 10 décembre 2013
La pêche profonde en accusation , (Madagascar ? no probléme!) Martine Valo 10/11/13 Le Monde
11 décembre 2013
Le Parlement européen rejette l'interdiction du chalutage en eaux profondes
Le chalutage et l'usage de filets maillants au fond des océans – les
deux méthodes les plus destructrices de la pêche dans les grands fonds
–, doivent-ils être interdits ? A cette question qui suscite d'intenses
efforts de lobbying depuis des mois, les députés européens, réunis en
session plénière à Strasbourg mardi 10 décembre, ont finalement répondu
non à l'issue d'un vote serré, par 342 voix contre 326. Les défenseurs
des océans espéraient que les élus iraient au-delà du compromis de
règlement laborieusement négocié au sein de la commission pêche du
Parlement en novembre. Cela n'a pas été le cas.
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La pêche profonde en accusation
Le 10 décembre, le Parlement européen devait
décider s'il interdit le chalutage en eaux profondes, qui provoque des
dégâts écologiques majeurs dans les abysses
Les défenseurs des
océans ont lancé une grande bataille : bannir la pêche en eaux
profondes, une pratique controversée qui détruit l'écosystème des
abysses.
Aujourd'hui, leurs yeux se tournent vers l'Europe où le
débat fait rage. Mardi 10 décembre, le Parlement de Strasbourg doit
prendre position : faut-il interdire aux professionnels de remplir leurs
chaluts tractés sur les fonds marins à plus de 200 mètres de
profondeur, comme le propose depuis 2012 la Commission européenne ? Au
contraire, les députés vont-ils trancher a minima comme leur
recommandent la France et l'Espagne – deux Etats gros pêcheurs en eaux
profondes – et se limiter à restreindre cette technique aux zones déjà
exploitées, interdisant d'explorer tout nouveau périmètre de capture ?
Le combat ne se mène pas que dans l'hémicycle européen. Il
se joue aussi au travers de grandes pages de publicité dans les
journaux, particulièrement en France, l'Etat membre le plus concerné.
Les anti y dénoncent les méfaits du chalutage tandis que les
professionnels du secteur – contestant la légitimité même des ONG qui
les attaquent – préfèrent mettre en avant la sauvegarde des emplois : 3
000, selon eux. Une poignée, selon les associations.
Ce face-à-face " passionnel " est nourri par des empoignades
incessantes sur les chiffres. Même si les grands chalutiers embarquent
des observateurs à leur bord, les armateurs ont beau jeu de dire que
personne n'est capable d'aller compter les poissons au fond des océans.
Quel est l'état réel des stocks ? Que représente vraiment l'économie de
la pêche profonde ? En réalité, tout est sujet à polémique.
Le chalutage de fond s'est développé dans les années 1980.
Après une surexploitation des zones côtières européennes, puis des eaux
des pays du Sud, le déclin s'est fait sentir. Les industriels se sont
alors tournés vers la haute mer, investissant dans des navires-usines
capables de remonter des chaluts raclant les fonds à 1 500 mètres, voire
plus.
A l'échelle de la planète, les données manquent.
L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture
(FAO) est incapable de dire le nombre de pays qui pratiquent réellement
la pêche dans les abysses. L'Union européenne est mieux dotée. Selon
Bruxelles qui tient des statistiques précises, la pêche profonde par
chalutage et filet maillant représentait seulement, en 2011, 1,5 % des
captures de l'Atlantique nord-est (47 000 tonnes), espace maritime
privilégié des grands chalutiers
En dépit de ces chiffres modestes, chercheurs et ONG n'en
démordent pas : la pêche profonde doit être bannie car elle constitue
une agression majeure pour l'écosystème marin. Pour six espèces
principales commercialisées – lingue bleue, grenadier de roche, sabre
noir, phycis de fond, dorade rose et béryx –, le chalut en ramasse des
dizaines d'autres, rejetées par-dessus bord. Surtout, le filet endommage
sur son passage coraux, éponges et racle les sols sédimentaires.
La pêche profonde s'attaque en outre à des poissons vulnérables dont les stocks prennent du temps à se régénérer. "
Sur 30 espèces connues, nous avons observé une durée de vie moyenne de
36 ans et une maturité sexuelle à partir de l'âge de 12 ans. Cela n'a
rien à voir avec un anchois qui peut se reproduire dès qu'il atteint un
an ", précise le biologiste Philippe Cury, spécialiste des
écosystèmes marins à l'Institut de recherche pour le développement
(IRD). Comme de nombreux scientifiques, le chercheur ne cesse d'alerter
sur le déclin des populations des abysses. En 2007, l'Union européenne a
dû interdire le prélèvement des poissons empereurs et des requins
profonds parce qu'ils étaient menacés d'extinction.
Tout cela pour une pêche " à peine rentable " selon
Bruxelles, et ce malgré les subventions dont elle bénéficie. Pourquoi la
France met-elle alors autant d'énergie à défendre un dossier qui la
fait montrer du doigt par les ONG et la majorité des autres Etats
membres ? Au-delà des emplois et du lobbying de ports comme Lorient et
Boulogne-sur-Mer (dont l'ancien maire n'est autre que Frédéric
Cuvillier, ministre de la pêche), les marins craignent qu'à terme on
leur interdise toute forme de chalutage, profond ou pas. Ce qui serait
un désastre pour la profession.
Du côté du consommateur, les campagnes des défenseurs des
océans commencent à peser. Certaines grandes enseignes – à l'exception
d'Intermarché qui arme les navires de la Scapêche spécialisée dans le
chalutage des grands fonds – ont entendu le message : Casino et
Carrefour ont décidé d'arrêter de proposer sur leurs étals plusieurs des
poissons qui nagent dans les grands fonds marins. Martine Valo
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