http://orbi.ulg.ac.be/handle/2268/190666
[fr]
Pour appuyer les efforts de conservation de la biodiversité, des
processus de transfert de gestion (TG) des ressources naturelles aux
communautés locales de base ont été promus à Madagascar depuis 1996 avec
un important financement étranger. Ce p’rocessus était censé stimuler
une forte responsabilisation des acteurs en plaçant la prise de
décisions dans la sphère locale, ce qui améliorerait l’efficacité. Le
transfert de fonds et de capacité ainsi que l’appui des partenaires sont
également requis pour rendre la décentralisation effective. Pourtant,
un désintérêt et une déresponsabilisation croissants quant à la gestion
des ressources par les populations locales ont été souvent constatés et
le taux de déforestation est resté élevé. C’est le cas de la zone
forestière de Mariarano où nous avons eu l’occasion d’observer la mise
en œuvre d’un TG. A travers les perceptions des acteurs clés dans le TG :
la communauté locale et l’administration forestière, ce travail
consiste à dévoiler les enjeux du processus participatif, les impacts de
la dépendance à l’aide, les stratégies de contournement des règles par
la population locale et l’évolution des rapports entre l’administration
et ses partenaires dans le cadre de l’Etat local.
A travers des actions déterminées par des prescriptions légales et
des délais, les agents d’appuis activent le processus, négligent les
clivages au sein de la population locale et cadrent les décisions
résultants des négociations vers l’objectif de conservation. Cette
procédure fait naître un sentiment d’imposition et aggrave
l’illégitimité des normes promues. Par ailleurs, la population locale
adopte un comportement opportuniste. Leur participation au processus
fonctionne plus comme un mode de contrôle et d’accès aux ressources
qu’un mode de préservation de celles-ci.
Pour la réalisation des tâches attribuées à la population locale et
des activités alternatives des usages, dont l’accès est désormais
réglementé, l’appui des partenaires est nécessaire vu leurs faibles
capacités financières et techniques. Toutefois, les appuis restent
ponctuels et limités selon la priorité et la disponibilité budgétaire
des bailleurs de fonds. La loi n’engage pas non plus les partenaires
pour faire l’accompagnement sur le moyen terme, bien que ceci soit
important pour provoquer des changements. Ceux qui n’ont pas ressenti
les avantages concrets sont allés vers des pratiques illégales.
Clandestinité et dissimulation sont les stratégies adoptées pour faire
valoir leurs droits. Une amplification de la complicité au sein de la
communauté gestionnaire est constatée pour contourner les règles.
Quant au rapport de l’administration avec ses partenaires, il s’est
détérioré. Dans un contexte marqué par la dépendance financière de
l’Etat envers les bailleurs de fonds, l’administration est limitée dans
ses fonctions et travaille comme consultant de ces derniers. Aux yeux
des paysans, l’administration apparaît comme étant inapte à honorer ses
engagements, ce qui nuit à sa crédibilité. Ainsi, elle rencontre des
difficultés pour obtenir la confiance et la coopération de la
population. Or celle-ci constitue le fondement de la gestion
participative.
La persistance des activités de déforestation résulte donc de
l’illégitimité des normes résultantes du processus participatif, du
recours des acteurs aux pratiques informelles et enfin de la paralysie
de l’administration.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire